Généralement appelé « le Jardin des Roches » ou le « Château de Gaudi », le jardin construit par Nicola di Cesare s’accroche au contrefort rocheux qui surplombe sa maison.
Nicola ne connait pas l’œuvre de Gaudi (enfin peut être a-t-il regardé de qui il s’agit depuis le temps qu’on le compare à lui ?). C’est donc un peu ridicule de l’appeler le « Gaudi de Grosio », d’autant plus que l’art de Nicola s’apparente plus à de la rocaille et que ses mosaïques sont faites de cailloux, de brisures de coquilles de moules, de plastique, de coquillages et autres petits morceaux récupérés ici et là.
Pour nous ce sera « le jardin offert », offert aux yeux, aux gens qui passent ou qui viennent exprès. L’accès est libre, plus encore, on se sent attendus, happés, bienvenus.
Cela fait 42 ans que Nicola construit sans jamais s’interrompre ce jardin vertical de 207 marches qu’on gravit sans s’en rendre compte, observant ici une mosaïque, là une niche, une cavité, un point de vue…
C’est un « salvamatrio », littéralement « sauveur de mariage », dit Nicola dans une vidéo tournée par Stefano Bolotta, car pendant qu’il est au jardin il n’est pas à la taverne et que quand « il rentre le soir il est fatigué et ne tourmente pas sa femme ». La seule chose qu’elle lui reproche c’est que chaque fois qu’il va à la décharge jeter quelque chose, il revient avec deux sacs de matériaux !
Nicola a atteint le sommet de son contrefort rocheux sur lequel il a bâti une sorte de petite chapelle. elle n’est pas complètement finie. Le cheminement pour y arriver ne l’est pas non plus, complètement fini…
Il dit que maintenant qu’il a atteint le sommet, il va revenir en arrière et finir ce qu’il a commencé. Comme s’il avait circonscrit le périmètre de son projet, du pied de sa maison au sommet de son enrochement. Car Nicola l’affirme, il n’a rien prévu, rien dessiné à l’avance. Et c’est sûrement ce qui fait le charme du lieu, sa sinuosité, son exubérance, sa liberté.
C’est un enchantement d’entrelacs de végétation, d’arches et de marches, de vases, de bancs, une explosion de couleurs et de gaité, une vue à couper le souffle.
Sur les quelques terrasses qui jalonnent la montée, des bacs et des caisses pleins de matière première attendent que Nicola reprenne le travail: des morceaux colorés de plastique, de verre, de céramique, d’assiettes, des cailloux, des galets…
Le jour de notre visite en juillet 2023, il n’y avait personne sur le site. Pourtant il semble que certains jours, le jardin attire entre 750 et 1 000 visiteurs. A tel point que Monsieur le maire de Grosio, qui veut gérer l’affluence, a dans l’idée d’installer une billetterie et des horaires de visite…
Heureusement, tant que Nicola sera en vie, pas question d’une billetterie, par question non plus de fermer le site. Mais après ? le jardin offert ne sera-t-il plus qu’une attraction touristique où il faudra gravir les marches à la queue leuleu, et ne pouvoir admirer la vue que derrière les perches à selfie?
Je me rend compte que nous étions arrivés à l’heure du déjeuner, heure où le touriste se restaure, fait la sieste ou se remet de sa grasse matinée. Je mesure aujourd’hui la chance que nous avons eu de pouvoir profiter seuls de ce lieu extraordinaire qui restera pour nous une merveille d’art brut.
Références:
Article sur le blog Outsider Environments Europe (Anglais)
Article sur le site Costruttori di Babele (italien)
Article sur le site Sondrio Today (italien)
Article sur le site IntoroTirano (italien)
Via Rovaschiera, 48, Grosio SO, Italia
Laisser un commentaire